[Rp] : Castillon - Lieu dit "Laussac" - Une arrivée.

Admin Messages : 1168 Date d'inscription : 18/02/2011

Eulalie a écrit:: “Nous portons tous des masques, mais vient un temps où on ne peut plus les retirer sans s'arracher la peau.”
André Berthiaume

J'avais fuis la Dordogne.

*****J’avais longé ce fleuve un long moment, j’avais même été tentée par « l’ile de la Boursate » cependant les flots de la Dordogne étaient trop impétueux à mon gout alors j’avais poursuivi le chemin jusqu’à me trouver devant le pont pour franchir « La Lidoire ». Ravie de constater qu’aucun octroi ne m’était demandé, je l’avais traversé avec allégresse. C’est sur celui-ci que je m’étais demandé si je ne devais pas remonter plus amont cette rivière. Mais tout en me questionnant, mes pas m’emmenèrent vers « le Rieuvert ». Un si petit ruisseau qu’il me plût de suite. Je l’ai suivi jusqu’au lieu dit : « Laussac ». Ce nom avait il une signification dans leur patois ? Je n’en savais rien, seul le paysage me fit m’y arrêter. Le paysage, une chaumine abandonnée, un ruisseau et le pré alentour.

*****Qu’étais je venue chercher ici ? A cela non plus, je n’aurai pas su répondre. Quoique…. Non je me mentais… L’envie de tout oublier, de tirer un trait sur le passé, de tenter de me retrouver, me ressourcer, pourtant j’étais presque certaine qu’il me faudrait une fois de plus « faire comme si », « faire comme eux » … Y parviendrais je ? J’en doutais.

Castillon m’était venu également par envie de m’occuper de vignes. Oui, cela avait été mon point de départ dans la recherche d’un pied à terre. Tailler, attacher, dompter, palisser, récolter. Oui ; soigner la terre, la vigne afin d’en sortir le meilleur du raisin puis, ouvrir un taudis et le noyer sous l’hypocras que je comptais élaborer a partir de mon propre vin. Et surtout oublier… oublier… L’oublie dans le labeur….. Nonobstant, je me connaissais suffisamment pour savoir que j’étais capable de foutre le feu aux ceps après seulement 1 mois, non pas par paresse, manque d’envie ou changement d’idée mais plus par désir de fuite.
La fuite, je ne connaissais que cela depuis si longtemps. La fuite des autres, leur compagnie.

Asociale.
Tel était le constat de ceux qui m’avaient croisé.
Asociale et harpie.
Pourtant, si ils savaient à quel point ce sont eux qui m y ont aidé. Dernièrement encore, un bonzhomme avait posée sa pierre sur l’édifice. Je ne suis pas certaine qu’il s’en soit rendu compte. Un souhait de sa part ; un de plus entendu avant qu’il ne change d’avis sans rien dire, sans explication; sans même un « au revoir » ; une parole tombée dans l’oubli derrière les portes du monastère de Sainte Illinda. Jamais il ne saura que son engagement non tenu a creusé davantage l’écart entre la civilisation dite « bien pensante » et moi-même. J’ai toujours tenu mes promesses. J’en ai souffert plus souvent qu’à mon tour tant le retour est quasi inexistant. Alors oui, je me méfie de tout le monde. Je les évite. Que quelqu'un s'approche trop près, je sors les griffes, les crocs.
Faire confiance … Ce n’est plus dans mes possibilités dorénavant. Ici, ailleurs, partout, je ne pourrais plus faire autrement.
Je ne sais plus le faire.

*****Les épaules voutées, les jupons empoussiérés, le visage fripé, je déharnache Santos, frison noir de jais offert par le chancelier de la Justice Sabaude Renard, un des rares ayant tenu sa promesse. Je devrais lui écrire, lui donner de mes nouvelles. Je remise cela dans un coin de ma mémoire, j y reviendrais plus tard. Son dernier parchemin m’en avait dissuadé, je devais réfléchir.
Je pose selle et bride sur le sol puis ouvre la porte du pré à Santos sans savoir à qui appartient l’endroit. Que m’importe en vérité, plus rien ne m’importe depuis bien longtemps. Mentalement je songe que si personne ne me fout dehors je devrais faire le tour du pâturage pour vérifier sa clôture, la vue d’ensemble n’a rien d’engageant. Chaque chose en son temps , me rappelle ma conscience quand je me baisse pour reprendre la selle que je porte jusqu’à la porte de la chaumine alors que Santos se désaltère déjà au ruisseau.

*****Je suis obligée de reposer mon barda sur le seuil pour tenter d’ouvrir la porte. Aucune résistance. Le malaise qui me dévorait le ventre se dissipe quand un nuage de poussière m’accueille. Plus personne n’a franchit ce seuil depuis des lustres, à n’en pas douter. Ma main sur le nez, je poursuis la découverte des lieux. D’autres images se bousculent dans ma caboche : un autre endroit, un paysage différent, une auberge abandonnée, un espoir puis la réalité. La douleur s’était effacée, tout comme ses mots acides reçus de la main d’un coursier, jusqu’à hier ou j’ai parcourue la liste des habitants de la ville ou je comptais me reposer pour une journée. Il était la. A des lieues et des lieues de chez lui … de sa vie … de sa clique … Alors tout m’est revenu en pleine face sans cependant que je ne revois son visage.
Un soupir m’échappe quand soudain Séraphin miaule à déchirer les enfers. Lui aussi me rappelle cet autre endroit, cependant il n’y est pour rien. Sourire désolé et amusé, j’ouvre ma besace. Un éclair noir en jaillit et retombe souplement sur le sol. J’entends son mécontentement dans son grondement autant que dans l indifférence qu’il me porte. Je sais qu’il se calmera. A la différence des Humains, les animaux ne sont pas rancuniers. Je l’abandonne à sa propre exploration.

*****Une nouvelle vie allait commencer ici, je le souhaitais, mais n’y croyais pas. Le masque, je le porte depuis bien trop longtemps...

Admin Messages : 1168 Date d'inscription : 18/02/2011

Eulalie a écrit:: Deux jours. Deux misérables jours avant que je me rende compte que ma place n'était pas ici. J'avais dormi un quart de nuit. Dormit et surtout fait un rêve des plus étrange. J’étais dans la chaumine, je l'embrassais du regard en me demandant par ou je commencerais la chasse à la poussière quand tout devint clair

Admin Messages : 1168 Date d'inscription : 18/02/2011

Eulalie a écrit:: Il me suffit de seulement quelques jours pour que je reprenne mon simple barda, harnache Santos, et remise Séraphin très mécontent , dans ma besace. Un autre endroit m'appelait, je préférai suivre mon instinct.
Sans regret, sans aucun " au revoir" a donner donner, je m'éloignais de Castillon.

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